07 Nov 2008 – Frustration & conquête
L ’armoire aux trophées est pleine après la fabuleuse saison 2007. Les rouennais ont des bulles de champagne plein les yeux, ils viennent d’écrire sans doute la plus belle page de l’histoire du baseball français avec le grand chelem (saison régulière, Challenge de France, Championnat de France, Coupe de France) et la première finale d’un club tricolore en Coupe d’Europe des Clubs champions. Pas de révolution, évidemment, pendant les premiers mois de l’inter-saison. Confiance pleine et entière est faite à l’effectif 2007. Un changement à la barre, toutefois, qui est confiée à Dany Scalabrini (le 8ème manager en 9 ans chez les Huskies), qui succède à Sébastien Bougie, de retour au Québec pour des raisons professionnelles. Quelques ajustements aussi avec l’arrivée de Laurent Aoutin (Compiègne) et Jean-Baptiste Couton (Montigny). Pendant ce temps, Sénart, qui est en train tout doucement de devenir l’ennemi intime des Huskies, sort la grosse artillerie avec les arrivées de Hervé, Benhamida, Anthony Meurant et Fessy. On sait déjà que les deux finalistes de 2007 ont de fortes chances d’entamer un nouveau bras de fer jusqu’au titre. L’hiver va être plus difficile à passer pour Rouen. Tout d’abord, un vilain coup du sort, quand Nicolas Dubaut, l’homme de l’année 2007, se fracture le poignet en chutant à moto. Un grosse et vilaine fracture qui le laissera en dehors des terrains pendant huit longs mois. Puis Karl Meljholm, le héros de la Coupe d’Europe, après avoir donné son accord à Xavier Rolland, change son fusil d’épaule et signe avec la nouvelle équipe de ligue Can-Am, les Ottawa Rapidz. Le président des Huskies va dénicher un autre lanceur de ligue indépendante, Jason Kosow, un lanceur de feu champion en titre de cette même ligue Can -Am. Puis pour muscler un effectif manquant un peu d’expérience, Randy Perez va rejoindre son frère Keino. Mais la machine Huskies est grippée. On le voit dès le premier match de la saison, à Toulouse, quand le jeune Garcia-Martinez domine l’attaque des Huskies. Rouen ne va pas bien. Les absences de Dubaut (blessé), Lecourieux (retourné en Nouvelle-Calédonie) Hagiwara et Bert (ces deux derniers sont aux Etats-Unis), pèsent lourd. Et les rouennais sont sans doute un peu rassasiés, ont du mal à se faire mal. Pendant que les Templiers écrasent tout sur leur passage, les Huskies laissent filer des matches par-ci, par-là, et leur niveau ne convainc pas grand monde.
CHALLENGE DE FRANCE
Le premier grand rendez-vous de la saison confirmera le malaise. Le Challenge de France se dispute à ClermontFerrand, et Rouen entend bien y défendre son titre. Pour le premier match face à Toulouse, la consigne est de serrer la défense pour prendre le moins de points possible. Le score final sera de 12-10 pour Rouen, un score qui condamnera plus tard les Huskies. Après une victoire facile face aux Arvernes, il faut battre Montpellier. Nathan French puis Laurent Andrades étoufferont l’attaque rouennaise, et les Barracudas profiteront des moindres occasions pour gagner et éliminer les Huskies. Rouen va mal, et se laissera surprendre la semaine suivante à domicile par Doug Grant et Clermont-Ferrand. Alors que la Coupe d’Europe approche, on s’inquiète vraiment pour les Huskies. Un des premiers tournants de la saison arrive, avec le retour de Kenji Hagiwara dont le talent et l’éternelle envie de gagner vont commencer à replacer les rouennais sur de bonnes bases. COUPE D’EUROPE La campagne de Grossetto est un peu moins glorieuse que celle de San-Marin, mais les rouennais parviennent quand même à atteindre pour la deuxième fois consécutive les demi-finales. Aucun club français n’était jamais encore parvenu à se glisser deux fois de suite dans le dernier carré de l’Elite européenne. Rouen fait le travail au premier tour, emmené par un Keino Perez comme toujours irréprochable avec une victoire contre les allemands de Mainz. Après avoir subi la loi de Grossetto, Rouen joue sa place en demifinale contre Anvers. Une performance énorme de Jason Kosow (18K) offre la victoire 8-0 aux Huskies, avec comme héros offensif Flavien Peron, qui frappe quatre coups-sûrs. En demi-finale, Rouen retrouve Kinheim. Les Huskies tiennent quelques manches, mais les erreurs défensives coûtent trop cher face à une formation de ce niveau. Les Huskies affrontent ensuite San Marin pour la 3ème place, une défaite 1-3 qui laissera des regrets tant le podium paraissait à portée de la main. Mais Rouen n’est pas encore tout à fait redevenu Rouen. L’équipe continue à monter tout doucement en puissance durant l’été. Pourtant Jason Kosow quitte le club, ayant trouvé du travail à New-York. Quelques signes sont encourageants, avec de belles prestations, mais la rechute n’est jamais loin. Une sévère défaite à domicile contre Sénart, un échec le premier jour à Montpellier pour le premier match de la phase finale, montrent que Rouen tousse encore. Mais Joris Bert revient, Nicolas Dubaut aussi, et tout le monde se met au diapason, à l’image d’un Mathieu Crescent héroïque au monticule dans une victoire 3-0 à Montpellier qui lancera le sprint final des rouennais. Avec 11 victoires dans les 12 derniers matches, Rouen dépasse sur le fil Sénart à la première place du classement. Un signe ?
CHAMPIONNAT DE FRANCE
Les rouennais et les templiers se retrouvent donc face-à-face. Les deux meilleures équipes vont donner un spectacle superbe. Sénart fera deux fois plier les rouennais, dans les matches 1 et 3, emmené par un Samuel Meurant sublime au monticule. Rouen réagit dans le match 2, non sans avoir tremblé jusqu’au bout. Le double jeu réalisé sur un bunt de Gaspard Fessy en 8ème manche restera sans doute le gros point tournant de cette finale. Alexandre Sochon viendra signer le sauvetage avec un nouveau double jeu aux dépens cette fois de Sébastien Hervé. Mais c’est bien Sénart qui a les cartes en main au matin du dernier dimanche de la saison. Les Templiers mènent deux victoires à une. Meurant a une nouvelle fois écœuré les frappeurs de Rouen, Fessy Rouen retrouve l’Europe à Grosseto (Italie) et réussit un nouvel exploit en se qualifiant pour les demi finales face aux hollandais de Kinheim. 63 La finale 2008 fut peut-être la plus dure pour Rouen. Mais à l’image de Randy Perez et de Kenji Hagiwara, les Huskies n’ont rien lâché. et Martinez ont montré leurs biceps en sortant très loin la balle, Benhamida a rajeuni de dix ans, tout semble aller dans le sens des Templiers. Certains ont même sorti les cigares en quittant le terrain Pierre-Rolland le samedi soir. Rouen est dos au mur. Mais Rouen ne vient pas de nulle part. Des années en commun d’efforts, de victoires, de plaisir, ne s’oublient pas, et jouent leur rôle quand il faut tout donner pour ne rien regretter. Les Huskies seront sublimes dans ces deux matches. Ils joueront leur meilleur baseball de la saison, au moment où il le fallait. Un régal d’intensité, de concentration, de stratégie, de technique, de réussite. Ce ne fut pas facile, car Sénart résista longtemps dans le premier match, mais commettra quelques erreurs mentales, comme celle de Martinez tentant d’étirer un double en triple pour se faire retirer par le relai de Bert – Scalarbini – R.Perez à un moment crucial du match. Nicolas Dubaut, en gagneur, tiendra la tête à Blesoff, et Sénart pliera en fin de match, pour concéder un sévère 12-2. Deux victoires partout, tout est à recommencer. Les Templiers envoient au monticule Mathieu Brelle-Andrade. Face à lui, Alexandre Sochon, qui avait lancé 8 manches sans rien donner aux Templiers dans le match 4 de cette même finale 2007. L’incertitude est totale. Elle ne durera pas longtemps. Sénart craquera mentalement dès la première manche, avec deux grosses erreurs mentales de BrelleAndrade sur des frappes de Scalarbini et Hagiwara. Le score aurait dû être de 0-0, il est de 3-0. Boris Marche est passé par là entre temps. Le capitaine des Huskies a survolé la finale, finissant avec une moyenne de .632 et 9 RBI. Les rouennais ne seront plus jamais vraiment en danger. Sochon accomplit ce qu’on attend de lui, faire frapper Sénart au sol. La défense fait le reste, à l’image de jeux fabuleux de R.Perez et de Scalabrini en 6ème manche. Le score monte à 9-1, puis 9-2 en 9ème manche avec Laurent Aoutin pour finir le match, qui se donne quelques petites sueurs froides contre Gaspard Fessy avec les buts remplis. Finalement, un ballon de Blesoff sera capté par Kenji Hagiwara pour mettre fin au match, et donner à Rouen son 5ème titre de champion de France. L’année à été dure, compliquée, frustrante, elle s’achève en apothéose. La magie des Huskies est toujours là.
LA FINALE 2008 VUE PAR… KEINO PEREZ
Keino Perez avait starté deux matchs lors de cette finale. Il se souvient plus de la finale 2007 que de cette édition 2008. Il n’a pas oublié que son petit frère Randy jouait avec lui cette année là.
« C’est difficile pour moi de parler plus particulièrement d’une finale. J’avoue que les finales 2007et 2008 se mélangent un peu dans ma tête. Les scénarios se ressemblent. Ce fut encore une fois très serré et cela aurait pu basculer dans l’autre camp. Cela n’avait pas été facile. Comme toujours en finale. Nos étrangers étaiet très forts, Dany Scalabrini et Randy Perez. C’était solide comme aujourd’hui avec le duo Larry Infante et Maxime Lefevre. Au monticule, j’avais affronté deux fois Samuel Meurant et cela donnait toujours des duels très intenses. On avait perdu les matchs 1 et 3 mais on avait montré du caractère. Comme toujours. On avait bien géré les deux derniers matchs. C’était particulier pour toi car tu jouais avec ton frère Randy ? Pas vraiment ? Randy et moi, on avait déjà joué ensemble au Venezuela et nos liens familiaux ne sont jamais entrés en compte sur le terrain. Sauf s’il était visé sur un hit by pitch, là j’aurai pu m’énerver… Randy avait fait une bonne saison en défense, en 3me base. Il avait bienn frappé aussi. Je me souviens d’un homerun à Rouen contre Samuel Meurant. Ce n’était pas lors d’un match capital, dans un moment décisif, mais je me souviens que sur le banc, en le voyant faire le tour des bases, j’étais très fier de lui. »